27 avril 2006

Balladur enfin perché? 

Selon Le Monde daté aujourd'hui, Jean-Louis Debré pourrait quitter l'hôtel de Lassay pour le Palais Royal en février prochain :
Jean-Louis Debré, le président de l'Assemblée nationale se verrait bien prendre la succession de Pierre Mazeaud. Le mandat du président du Conseil constitutionnel expire en février 2007, soit quelques mois avant la présidentielle. L'affaire est délicate, mais possible. Trois membres du Conseil sortent, en février 2007, à l'expiration de leur mandat de neuf ans : M. Mazeaud, nommé par le président de la République ; Simone Veil, nommée par le président du Sénat ; Jean-Claude Colliard, nommé par le président de l'Assemblée nationale.

Juridiquement, rien ne s'oppose à ce que M. Debré use de son droit de nommer le remplaçant de M. Colliard, puis qu'il soit nommé à son tour à la tête du Conseil constitutionnel par le président de la République.
L'article ne dévoile rien des intentions de Chirac en la matière, mais le choix de Debré pour remplacer Mazeaud semble a priori le plus évident, dans la mesure où le président de l'Assemblée nationale est l'un des derniers fidèles du chef de l'Etat et qu'il peut en outre justifier de quelques compétences juridiques, en tant qu'ancien juge d'instruction. La présence de Debré rue Montpensier permettrait aussi à Chirac de beaucoup moins s'emmerder pendant les séances si jamais il décide de sièger au Conseil constitutionnel après son départ de l'Elysée en mai 2007.

La solution présenterait néanmoins un inconvénient non-négligeable : celle de remettre en jeu la présidence de l'Assemblée nationale. En toute fin de législature, ce qui est quelque peu fâcheux sur le plan institutionnel (quoique la IIIe République n'est pas morte de la rotation rapide des présidents au palais Bourbon). Et surtout à quelques semaines de la présidentielle, dans un contexte de décrépitude avancée du parti du président, ce qui l'est beaucoup plus sur le plan politique.

On peut en effet être à peu près certain que l'élection d'un nouveau président de l'Assemblée nationale en février 2007 serait remporté par un proche de Nicolas Sarkozy. On peut aussi supposer que ce proche a de bonnes chances d'être Edouard Balladur. L'ancien Premier ministre n'a jamais caché son désir d'accéder au perchoir et s'était d'ailleurs présenté à la présidence de l'Assemblée en juin 2002, la "primaire" à droite se soldant finalement par la victoire de Debré (217 voix contre 163 au premier du scrutin). S'il devait être adoubé par Sarkozy en février prochain, on voit mal qui pourrait l'empêcher de s'installer, fût-ce pour seulement quelques mois, à l'hôtel de Lassay. Je doute qu'une telle perspective soit de nature à enchanter Chirac.

NB : question connexe à mes lecteurs publicistes : est-ce que Jean-Louis Debré, président de l'Assemblée nationale, pourrait user des pouvoirs que lui confère la Constitution pour nommer en février prochain le citoyen Jean-Louis Debré au Conseil constitutionnel? Je ne dis pas qu'une telle décision soit plausible : le tollé médiatique et politique qu'une "autonomination" susciterait est certainement suffisant pour décourager ce type de velléités.

Mais je ne vois pas bien en quoi les textes qui encadrent la procédure de nomination au Conseil s'y opposeraient, à supposer qu'on trouve un juge qui accepte un recours contre la décision de nomination (ce qui est douteux).