11 mai 2004
Phersu résume joliment le petit jeu de faux semblants auquel se livre les ténors de la droite :
Ce qui me fait le plus rire dans toute cette histoire de Référendum sur la Constitution européenne est que Chirac fait semblant d'avoir le choix d'en faire ou pas, Sarkozy fait semblant de pouvoir influencer Chirac en disant qu'il en faut un, Juppé fait semblant de soutenir l'idée pour ne pas se faire trop dépasser par Sarkozy, Raffarin fait semblant d'avoir la moindre autorité sur tout le monde, Chirac fait ensuite semblant de pouvoir temporiser alors que même son parti s'est prononcé pour.Cela dit, je ne suis pas sûr d'adhérer complètement à sa conclusion :
Bien sûr qu'il y aura un Référendum sur la Constitution de Giscard. Chirac est d'un attentisme idiot en ne le reconnaissant pas.Je suis très favorable à l'idée du référendum, et pas seulement pour remplir un calendrier électoral qui s'annonce bien vide jusqu'en 2007. Mais il me semble que Phersu sous-estime quelque peu les capacités de Chirac à fuir ses responsabilités politiques. Le bougre avait déjà promis en 1995 un référendum sur la réforme de l'éducation [attention : musique midi insupportable derrière ce lien], dont personne n'a jamais vu la couleur. En 2000, il avait fallu le feu combiné de Giscard, Juppé (déjà) et Jospin pour que Chirac finisse par concéder un référendum sur le quinquennat.
La pression de la droite est certes importante aujourd'hui. Mais je doute que la gauche fasse preuve d'un enthousiasme délirant à demander une consultation qui risque de réouvrir des divisions qu'elle a réussi tant bien que mal à cacher depuis quelques mois.
L'argument selon lequel toutes les grandes réformes des dernières décennies ont fait l'objet de référendum est aussi infondé. D'une part, nombre de révisions consitutionnelles ont été adoptées par le parlement réuni en congrés. De l'autre, et à part Maastricht, tous les traités européens récents (Acte unique, Amsterdam, Nice) ont été ratifiés par la voie parlementaire.
Enfin, malgré son nom, ce projet de constitution a beaucoup plus l'allure juridique d'un traité que d'une constitution. Et il n'apporte pas d'innovations délirantes par rapport à la vraie grande avancée qu'était Maastricht : c'est plus une super-consolidation des textes existants qu'un vrai texte fondateur.
S'il le veut, Chirac a donc pas mal de bonnes raisons politiques, historiques et juridiques pour justifier un lapin posé aux électeurs. Mais le veut-il? Je n'en sais rien. Il est possible qu'il cherche juste à défendre son pré carré constitutionnel en n'ayant pas l'air d'agir sous la pression. Mais il n'est pas totalement exclu qu'il cherche, sur cette question comme sur d'autres, à s'éviter des emmerdements superflus.
Mis en ligne par Emmanuel à 19:45 | Lien permanent |
