21 juin 2004

Lundi, c'est Piketty 

Une semaine sur quatre en tout cas. Et la dernière fournée, sur le bilan économique et social de Tony Blair, est tout à fait bienvenue. D'une part, parce que je projetais d'écrire une bafouille sur le même sujet et que je vais pouvoir m'en dispenser sans mauvaise concience. D'autre part, parce que Piketty parvient à critiquer le blairisme sans tomber dans le travers regrettable d'une trop grande partie de la gauche française, qui a tendance à assimiler Blair (selon les mots d'Henri Weber sur Public Sénat la semaine dernière) à "un affreux croquemitaine, à peine moins détestable que Reagan et Thatcher".

On pourrait certes reprocher à Piketty de ne pas mentionner certaines mesures de politique économique qu'on peut légitiment porter au crédit de Tony Blair: forte augmentation du salaire minimum, indépendance donnée à la banque centrale, pilotage macroéconomique intelligent. Mais un bilan-catalogue aurait sans doute été moins intéressant que l'approche choisie, qui se focalise sur la faiblesse de la productivité britannique et l'échec du blairisme à y remédier. Et puis, comment pourrais-je critiquer une chronique dont le paragraphe final contient ces lignes (je souligne):
II serait pourtant erroné de s'en tenir à ce constat d'échec et de rejeter en bloc le message blairiste. Si la «troisième voie» a suscité autant d'attention et si Blair lui-même conserve un tel capital de sympathie dans les opinions européennes (y compris en France), c'est d'abord parce qu'il a su articuler un discours positif et conquérant sur la mondialisation, à l'opposé des discours trop exclusivement défensifs et frileux souvent tenus par les socialistes français.
Pour un peu, on en concluerait que Piketty est de mèche avec DSK, qui est parti hier soir à l'attaque contre une direction du PS qui rechercherait le "plus petit dénominateur commun, en évitant les faux pas et les pièges". Mais en l'absence de preuve réelle et sérieuse, ce serait faire preuve d'un persiflage tout à fait malvenu.