08 juillet 2004

Darfour : à quoi joue la diplomatie française? 

Via Instapundit (oui, je sais, en plus il lit les articles de travers, comme d'habitude), cet inquiétant article de la BBC sur le refus de la France d'utiliser la menace de sanctions de l'ONU contre Khartoum :
"In Darfur, it would be better to help the Sudanese get over the crisis so their country is pacified rather than sanctions which would push them back to their misdeeds of old," junior Foreign Minister Renaud Muselier told French radio.

France led opposition to US moves at the UN over Iraq. As was the case in Iraq, it also has significant oil interests in Sudan.

Mr Muselier also dismissed claims of "ethnic cleansing" or genocide in Darfur.

"I firmly believe it is a civil war and as they are little villages of 30, 40, 50, there is nothing easier than for a few armed horsemen to burn things down, to kill the men and drive out the women," he said.

Human rights activists say the Janjaweed are conducting a genocide against Darfur's black African population.
Encore une fois, la raison des intérêts pétroliers (c'est à dire les intérêts de Total) est évoquée pour justifier l'attitude de la France. Encore une fois, je suis sceptique, en partie parce que Total aurait beaucoup à gagner à un retour du Soudan dans le concert des Nations, comme le notait cet article paru dans le magazine américain Forbes en juillet 2003 :
Total has been holding concessions to Block B [le nom non-officiel d'une zone d'exploration] for around 20 years in the disputed south of Sudan. The last thing it wants is to start pumping the waxy, sulfurous oil right where Sudanese are massacring Sudanese. So Total and the Khartoum government play a little game: Every year Sudan's oil ministry tries to compel Total to begin extraction under its contract; every year Total invokes force majeure, pays some $50,000 to renew the license for its concessions and does nothing. ChevronTexaco abandoned Sudan in 1984 without a drop of oil to show for its $1.5 billion investment. Total hangs in, hoping the winds of change will one day blow the country's unsavory image away. There's up to 5 billion barrels under the bloody Sudanese soil, including Block B. "I'm not sure we'll ever get any oil out of there," sighs Desmarest.
En tout cas, les déclarations de Muselier sont proprement scandaleuses. Il ne me semble pas choquant de mettre en doute la qualification de génocide, qui a une acception juridique précise. Mais faire croire que le conflit en cours s'apparente aux actions non téléguidées par Khartoum de "quelques cavaliers en armes" est inacceptable. Il serait temps que la presse française s'en rende compte, au lieu de relayer systématiquement la ligne du Quai et de chercher la paille dans l'oeil des Américains. Car si, dans cette affaire, toute la communauté internationale est coupable, il semble que certains pays sont plus coupables que d'autres.

NB : Pour une vue plus large de la situation actuelle et une discussion sur la qualification de "génocide", voir cette note très claire de Versac.