18 août 2004

Théorie du complot 

Jeudi 29 juillet. Le Monde révèle qu'un très gros contrat portant sur des avions Rafale est en passe d'aboutir : l'Etat va acheter au groupe Dassault 59 appareils, pour un montant record de plus de 3 milliards d'euros.

D'où vient ce contrat ? Et pourquoi, après avoir été bloqué durant de longs mois, est-il subitement en passe d'aboutir ? Dans les milieux industriels, aussitôt une hypothèse circule : un mois après le rachat par Serge Dassault de la Socpresse (qui compte 70 titres dont Le Figaro, L'Express, La Voix du Nord, Le Progrès, Le Dauphiné libéré, Presse Océan...), sans doute y a-t-il dans ce contrat plus qu'une coïncidence. "C'est une sucette pour neutraliser la presse Dassault et pour qu'elle ne tombe pas dans le "sarkozysme"", assure un grand patron qui connaît le dossier.
Laurent Mauduit
"Quatre jours ordinaires dans la vie des affaires"
Le Monde, 17 août 2004


En s'habillant du costume de chef de parti, Nicolas Sarkozy changerait de panoplie, de registre. Il ne serait plus au service de tous les Français. Son engagement ne serait plus motivé par la défense de l'intérêt général, mais par celle de causes qui apparaîtront, qu'il le veuille ou non, partisanes. L'image du ministre actif et sans peur pourrait souffrir de celle de l'homme du «y a qu'à», «faut qu'on». Trois ans à tenir ainsi d'ici à la présidentielle de 2007, avec un président de la République qui lui ménage sa sympathie, les querelles intestines de l'UMP et les immanquables contre-pieds de ses «amis», c'est long, délicat... Même quand on n'a pas «l'habitude de se dérober», comme il l'a répété hier.

Mieux vaut tenir que courir, dit le poète. Nicolas Sarkozy s'est fait une réputation, qui colle davantage à celle d'un sprinteur qu'à celle d'un marathonien. Il se voit maintenant un destin. Il est à la mode. Mais les modes passent. Le poète, lui, peut se tromper. Mais, souvent, son verbe traduit une implacable vérité.
Yves Thréard
"Le risque de Sarkozy"
Le Figaro, 18 août 2004