23 décembre 2004
Alors, comment ça va? Pas mieux, comme on dit aux Chiffres et aux Lettres. D'autant que la stabilité légendaire de Windows XP et ma négligence habituelle viennent de me faire perdre une longue note sur L'article du Canard enchaîné d'hier. Article révélant la grossière erreur de droit commise par la cour d'appel de Versailles dans son arrêt du 1er décembre condamnant Alain Juppé pour "prise illégale d'intérêt". Et que je ne me sens pas vraiment de vous la refaire en aussi détaillée et pédagogique. Avec mes excuses, je vous soumets donc la version courte.
Ce qu'il faut lire :
- L'article de Louis-Marie Horeau du Canard Enchaîné d'hier (page 3). Pour ceux qui n'ont pas l'hebdomadaire palmé à portée de mains, le site du Nouvel Obs' publie un bon résumé de l'affaire.
- Les fameux articles 132-21 du Code pénal et L7 du Code électoral, pour les plus motivés.
- L'interview de Me Forget sur le site du Nouvel Obs' qui montre comment Juppé peut se tirer d'affaire sans grâce présidentielle (solution évoquée par le Canard, mais politiquement désastreuse).
- Un commentaire bien technique comme il faut de l'arrêt du 1er mars 2001 de la Cour de cassation.
Ce que j'en dit :
- L'erreur de la cour d'appel de Versailles est vraiment très grosse : la notion d'abrogation tacite de la loi ancienne par la loi nouvelle et celle de la primauté de la loi spéciale sur la loi générale sont des notions que l'on aborde dans les premières séances d'un cours d'Introduction au droit.
- Le fait qu'il faille attendre 3 semaines, et le Canard Enchaîné, pour qu'une telle erreur soit relevée est proprement ahurissant. A se demander où sont passés les journalistes et leurs contacts pendant ce temps. J'ai toujours peur de tomber dans le pro-américanisme facile et dans le blogo-triomphalisme aigu mais je suis quasiment certain, en l'espèce, qu'une telle boulette aurait été exposée en moins de 24 heures aux Etats-Unis. (Soyons justes : l'erreur a été relevée quelques jours après la décision, par un commentateur d'un forum du Monde. Mais l'info n'a pas été reprise.)
- Finalement, ce doit être parce que tout le monde s'en fout. Le droit est compliqué, Juppé est réhabilité et les otages sont libérés. Seul le Nouvel Obs a fait écho à l'article du Canard. Libé, Le Monde, Le Figaro sont aux abonnés absents, si je me fie à mes recherches sur leurs sites Internet respectifs. Conclusion : aucune, sinon que la presse française ne cesse pas de me surprendre. En mal, généralement.
Add. (24/12) : Voir le contre-argumentaire de Paxatagore, qui me tape sur les doigts pour mes formules définitives et réfute point par point la thèse du Canard. Au vu de ce que je comprends de l'affaire, sa distinction entre les deux alinéas de l'article 132-21 me semble assez convaincante. Ce qui voudrait quand même dire que l'avocat interrogé par l'Obs et le professeur de droit (anonymement) cité par le Canard se trompent gravement. Est-ce qu'Eolas pourrait nous donner son sentiment, entre la dinde et la bûche?
Mis en ligne par Emmanuel à 21:51 | Lien permanent |