03 janvier 2005

Why do Americanophiles hate America? 

De qui, cette remarque cinglante sur la stratification de la société américaine?
The most remarkable feature of the continuing power of America's elite—and its growing grip on the political system—is how little comment it arouses. Britain would be in high dudgeon if its party leaders all came from Eton and Harrow. Perhaps one reason why the rise of caste politics raises so little comment is that something similar is happening throughout American society. Everywhere you look in modern America—in the Hollywood Hills or the canyons of Wall Street, in the Nashville recording studios or the clapboard houses of Cambridge, Massachusetts—you see elites mastering the art of perpetuating themselves. America is increasingly looking like imperial Britain, with dynastic ties proliferating, social circles interlocking, mechanisms of social exclusion strengthening and a gap widening between the people who make the decisions and shape the culture and the vast majority of ordinary working stiffs.
On croirait lire les Pinçon-Charlot écrivant dans The Nation. Ou un article du Monde diplo in English. Mais, en fait, comme les références à la Grande Bretagne victorienne le laissent supposer, cette envolée empreinte d'une bonne dose de shrillness nous vient tous droit de Londres et des pages d'un hebdomadaire qui porte son pro-américanisme et son pro-capitalisme en bandoulière.

Le phénomène de reproduction des élites n'est qu'un élément du déclin de la méritocratie américaine : l'article, acessible en ligne aux non-abonnés, conclut que la progression des inégalités aux Etats-Unis depuis les années 1970 ne s'est aucunement accompagnée d'une progression comparable de la mobilité sociale (qui semble même régresser). De fait, au-delà d'une mythologie du "rags to riches" qui se porte bien, la société américaine est beaucoup moins méritocratique qu'on ne le croit :
There is also growing evidence that America is less socially mobile than many other rich countries. Mr Solon finds that the correlation between the incomes of fathers and sons is higher in the United States than in Germany, Sweden, Finland or Canada. Such cross-national comparisons are rife with problems: different studies use different methods and different definitions of social status. But Americans are clearly mistaken if they believe they live in the world's most mobile society.
L'analyse n'est pas nouvelle : en s'appuyant sur les mêmes éléments, l'économiste Alan Krueger arrivait aux mêmes conclusions dans une de ses chroniques pour le New York Times en 2002. Mais il est significatif que The Economist s'en inquiète.

Bien sûr, le journaliste de l'hebdomadaire britannique en profite pour glisser certaines lubies maison : le paiement des professeurs au mérite comme solution miracle (la mise en place d'un tel système est en fait très problématique, comme le notait récemment Harry Brighouse chez Crooked Timber); une critique, certes nuancée, de l'affirmative action; et cette manie désagréable de renvoyer Républicains et Démocrates dos à dos sur le sujet.

Cela n'empêche pas l'enquête d'être bien argumentée et réellement passionnante. Très inquiétante, aussi, dans la mesure où l'administration Bush semble tout faire pour consolider la ploutocratie actuelle.