21 mars 2005

Bande des quatre 

Le Monde (dont le nouveau site a succombé à la mode absurde des menus déroulants) consacrait ce week-end un dossier à la préparation du projet du Parti socialiste pour 2007, entreprise conduite par Dominique Strauss-Kahn, Martine Aubry et Jack Lang. Un article présente quatre chercheurs en sciences sociales dont les travaux inspirent fortement la réflexion des responsables socialistes : Eric Maurin, Jacques Donzelot, Philippe Askenazy et (parce que c'est lundi) Thomas Piketty.

Quelque chose me dit qu'on va avoir droit à une épidémie d"'égalité formelle contre égalité réelle" dans les deux ans à venir (et que cela deviendra rapidement horripilant). Au-delà, il faut noter que les inspirateurs sont :
  • A 75% des économistes.
  • Clairement proches de la deuxième gauche et de la tradition sociale-démocrate (on sent l'influence de DSK).
  • Sinon américanophiles, au moins prêts à trouver des bonnes choses dans le modèle économique et social américain. Thomas Piketty a sorti un recueil de chroniques intitulé "Vive la gauche américaine". Philippe Askenazy propose, dans les Désordres du Travail, de s'inspirer des solutions trouvées aux Etats-Unis pour traiter le problème de la pénibilité du travail. Et, pour Jacques Donzelot, "les expériences de "démocratie participative" à l'américaine constituent [...] des exemples dignes d'intérêt.
Dans ces conditions, les quelques extraits du "diagostic sur la France de 2005" (présenté comme une étape dans l'élaboration du projet) presentés par Le Monde sont franchement décevants. Notamment quand le texte sort des truismes pour tomber dans l'erreur d'analyse pure et simple :
Un nouvel ordre économique mondial s'est installé, caractérisé par une polarisation économique autour des entreprises transnationales, nouveaux maîtres du monde, qui imposent leur loi à des concurrents, aux consommateurs, aux Etats et aux institutions nationales.
Je ne doute pas que la dénonciation rituelle de la puissance écrasante et grandissante des multinationales rassurera l'aile altermondialiste du PS, mais cet argument est largement faux. En fait, les données montrent qu'il n'y a aucun signe concluant d'une augmentation récente de la taille et du pouvoir économique et politique des plus grandes entreprises mondiales (voir cette étude - pdf).

Add. (22/03) : comme le fait justement remarquer une anonyme commentatrice, j'ai lu l'article du Monde complétement de travers en zappant le fait qu'étaient présentés en regard la contribution officielle (1) et la réplique du NPS (2). Du coup, la critique formulé dans la deuxième partie de la note tombe, dans la mesure où je suis très d'accord avec les extraits du "diagnostic sur la France 2005" (à part concernant le bien-fondé de la politique industrielle, mais c'est une question complexe, sur laquelle j'ai du mal à avoir un avis définitif). Mes excuses pour cette erreur grossière.