10 mars 2005

Mon plan économique pour l'Europe 

La croissance européenne est en berne, le taux de chômage atteint des niveaux franchement catastrophiques en France et en Allemagne et les commentateurs économiques nous reservent quotidiennement le refrain sur les rigidités structuelles et la compétitivité et la purge nécessaire pour retrouver le dynanisme économique perdu. Pendant ce temps, les Etats-Unis nous narguent du haut de leur 4% de croissance annuelle.

Faut-il désespérer? Non! Quelques mesures de bon sens devraient permettre de sortir notre vieux continent de l'ornière récessionniste, à condition de se rappeler que "nous sommes tous (redevenus) keynésiens maintenant" et que la perception compte au moins autant que la réalité (dans la mesure où un Jean-Marc Sylvestre de base a toujours tendance à prendre une vessie conjoncturelle pour une lanterne structurelle). Voici donc, en dix points, [roulements de tambour!] mon programme économique pour l'Europe :

1. Financer par l'endettement des grands travaux équivalent à plus d'un point de PIB européen dans un pays étranger (en réservant les appels d'offre aux entreprises européennes, cela va de soi).

2. Augmenter massivement les déficits publics (de 5 points de PIB en 3 ans, par exemple).

3. Demander à la BCE de sortir des analyses économiques sérieuses et alarmistes sur le risque de déflation (pdf), puis baisser les taux d'intérêts une fois que les marchés financiers sont suffisamment inquiets de la perspective d'un scénario à la japonaise.

4. Faciliter le refinancement des emprunts immobiliers, permettre aux ménages d'emprunter contre la valeur de leur logement, introduire le système d'hypothèque inversée, développer le crédit à la consommation. Et supprimer l'infâme réglementation sur le taux d'usure, qui empêche les pauvres d'accéder au crédit.

5. Regarder l'endettement des ménages exploser, la bulle immobilière gonfler et demander au gouverneur de la BCE d'annoncer que ces développements sont en ligne avec les fondamentaux économiques et certainement pas des signes de déséquilibres.

6. Annoncer les chiffres trimestriels de la croissance du PIB en rythme annuel, et plus en rythme trimestriel.

7. Retraiter les chiffres de croissance européens en prenant davantage en compte l'effet qualité, de façon à augmenter la croissance annuelle annoncée de quelques dixièmes de point (pdf).

8. Transférer une partie non-négligeable de la population la plus défavorisée (et donc la moins employable) des fichiers de l'ANPE aux registres de l'administration pénitentiaire.

9. Accuser tout ceux qui disent que l'économie ne va pas bien de femmelettes.

10. Forcer les commentaires économiques à répéter tous les matins ces phrases immortelles (tirées d'un célèbre torchon marxisant) :
Indeed, one might say that the economic performance of the euro zone and America has not been hugely different over the past decade, but that American optimism has disguised this. European policymakers are forever fretting aloud about structural rigidities, slow growth, excessive budget deficits and the looming pensions problem. In contrast, American policymakers love to boast about America's economic success while playing down the importance of its economic imbalances.
Absurde? Peut-être. Mais ça marche plutôt bien ailleurs. Et de toute façon, c'est beaucoup plus réaliste que ça.