07 novembre 2005
"Mais qu'est-ce qu'on attend pour foutre le feu?" se demandait NTM en 1995. Que Sarko ose le mot "racailles" au pied d'un immeuble de banlieue, apparemment, s'il faut en croire le discours médiatico-politique ambiant. Sauf que cette interprétation ne tient pas debout, quoi qu'on pense par ailleurs de la bravache rhétorique du ministre de l'Intérieur, ministre d'Etat (et j'en pense personnellement le plus grand mal, ce qui ne surprendra pas mes lecteurs).
Comme le rappelle Bladsurb chez Versac, il semble en effet que le "racailles" de Sarkozy, prononcé à Argenteuil le mardi 25 octobre, ne soit revenu au premier plan de l'actualité qu'à la faveur des déclarations d'Azouz Begag dans le Libération du mardi 1er novembre. On était alors cinq jours après les premières violences à Clichy-sous-Bois. Et la "contagion" à d'autres villes de Seine-Saint-Denis avait déjà débuté la veille, lundi 31 octobre.
On pourrait certes arguer que le rappel des propos de Sarkozy n'a rien fait pour calmer les esprits. Peut-être, encore que je doute qu'il s'agisse d'un facteur d'une importance plus que secondaire, en dépit de ce que les exploitations subséquentes de ces propos (par les villepino-chiraquiens, par la gauche et par les émeutiers eux-mêmes) pourraient faire croire. Après tout, quitte à tirer sur le ministre de l'Intérieur, il était toujours possible d'aller chercher d'autres déclarations incendiaires, comme sa sortie sur le "passage au karcher" de juin dernier à La Courneuve. Ce qui fut d'ailleurs fait et qui m'incite à penser que la face du monde n'aurait pas été changé avec un "racailles" en moins.
Ce qui est hautement ironique, dans cette affaire, est que les zélés défenseurs du matamorisme sarkozien préfèrent dénoncer l'anti-sarkozisme supposé des médias, coupables d'avoir sorti la déclaration d'Argenteuil de son contexte et donc d'avoir mis le feu aux barils de poudre des banlieues. Comme si le règne de la petite phrase et l'image choc à la télévision datait d'il y a deux semaines. Et surtout en concédant aux anti-Sarko un lien de causalité entre les propos récents du ministre et la flambée de violences qui n'a pourtant rien d'évident.
Mis en ligne par Emmanuel à 23:47 | Lien permanent |
