11 octobre 2007

Cette droite qui n'aime pas les riches 

La commission des finances de l'Assemblée nationale se réunissait hier pour examiner le projet de loi de finances pour 2008. Et ce qui ne devait pas se passer arriva : les députés de la majorité ont décidé de mettre leur gouvernement dans l'embarras, en votant un amendement supprimant un dispositif gouvernemental qui prévoyait d'instaurer un régime optionnel de taxation des dividendes au taux libératoire de 16%.

Jusqu'à maintenant, en effet, les revenus des dividendes sont intégrés à l'assiette de l'impôt sur le revenu, après avoir été dûment abattus de 40%. Le régime proposé par le gouvernement aurait permis aux heureux contribuables fréquentant le taux marginal supérieur de l'IR et possédant un bon paquet d'actions de faire baisser conséquement leur imposition. Conséquence paradoxale : la suppression de la mesure coûterait à l'Etat 600 millions d'euros en 2008.

Le concept du cadeau fiscal qui permet de diminuer le déficit budgétaire a plus qu'embrouillé une bonne partie du lectorat Internet du Monde (indice pour résoudre la contradiction : le prélèvement libératoire est payé au moment du versement du dividende, l'impôt sur le revenu se calcule sur les revenus de l'année précédente) mais ce qui me semble encore plus intéressant est la façon dont un député UMP justifiait son vote en commission :
M. Chartier, membre de la commission des finances, insistant sur l'aspect politique de la décision s'est dit favorable au bouclier fiscal mais "opposé à l'augmentation du pouvoir d'achat des Français les plus riches"
Passons vite sur cette aussi curieuse que stupide opposition du député Chartier à "l'augmentation du pouvoir d'achat des Français les plus riches" (faut-il condamner les 200 familles au gel à perpétuité de leur niveau de revenu?). Disons simplement que si ce genre de phrase avait été prononcé par un membre du Parti socialiste, il ne fait guère de doute qu'elle aurait fait les gras cabbages de mon correspondant à Londres, qui l'aurait rappelé à intervalles réguliers pour illustrer l'indécrotable marxisme de la gauche française.

Et arrivons au coeur de l'argument de Jérôme Chartier : la comparaison entre le bouclier fiscal et le prélèvement libératoire sur les dividendes. Deux mesures qui n'ont évidemment rien à voir entre elles. Qu'on en juge :

Le bouclier fiscal est une faculté donnée aux Français dotés d'un gros patrimoine (en pratique, la mesure ne concerne que les fortunés redevables de l'ISF) de réduire sensiblement le montant de leur imposition. Avec pour conséquence d'augmenter le pouvoir d'achat des plus riches après impôts.

Au contraire, le prélèvement libératoire à 16% des dividendes est une faculté donnée aux Français dotés d'un gros patrimoine (une banquière estimait récemment dans Les Echos qu'il fallait un portefeuille de titres supérieur à 1 million d'euros pour que l'option soit profitable) de réduire sensiblement le montant de leur imposition. Avec pour conséquence d'augmenter le pouvoir d'achat des plus riches après impôts.

La différence est limpide. Autant, pour tout dire, que la volonté du député Chartier de prendre les Français pour des veaux.