27 mars 2008

Prévisions, pièges à con 

La prévision de croissance sur laquelle avait été bâtie le budget 2008 n'aura donc tenu que six mois. Mais le revers a au moins sa médaille, nous assure Christine Lagarde : "la France est un des pays européens qui résiste le mieux" à la dégradation de la conjoncture économique.

Et les commentateurs d'embrayer aussi sec, sur des airs allant du "l'Allemagne paye sa dépendance à la demande mondiale" au "la France va de toute façon tellement mal qu'il était difficile de tomber plus bas" (l'insupportable Marc Touati, un matin sur BFM).

En oubliant juste, mais cela devient une habitude, d'aller regarder les chiffres.

A regarder la conférence de presse donnée hier par Christine Lagarde (disponible pour la première fois en vidéo sur le site du Minefe Minecindem), il apparaît que la ministre se fonde sur les prévisions de la Commission européenne. Plus précisement sur l'écart entre les prévisions publiées en novembre 2007 et celles bien planquées à la page 8 du dernier rapport trimestriel sur la zone euro (ouais, j'ai des lectures sympa).





Effectivement, la France résiste mieux que l'Italie, que l'Allemagne et que la zone euro sur cet échantillon quand même bien réduit.

Le problème, en fait, est qu'il suffit de changer de dates et de prévisionnistes pour que la conclusion s'écroule. Comme toujours en pareil cas, le Poll of forecasters publié au début de chaque mois par le magazine-qui-fait-croire-aux-cons-qu'ils-sont-très-intelligents se revèle fort utile. En comparant par exemple les prévisions moyennes de septembre 2007 (mois où a été calé l'hypothèse de croissance du budget pour 2008) et de mars 2008 (dernier chiffre connu), on trouve ça :




D'un coup, l'exceptionnelle résilience de l'économie française apparaît tout de suite vachement moins frappante. Mais bon, déjà que les choses ne vont pas follement bien, on ne va pas non plus se ruiner le moral à se dire qu'on ne fait pas mieux que les autres. Non?