19 avril 2005

Habent Papam 

Et Josef Ratzinger fut Benoît XVI.

Autant, comme le constate également Phersu, pour l'adage, qui veut que celui qui entre pape dans un conclave en ressorte cardinal. Sous-entendu : le favori n'est jamais élu, ce qui est d'ailleurs faux historiquement, comme en témoignent les exemples récents de Pie XII ou de Paul VI.

Autant, aussi, pour l'absolue faillibilité prédictive de The New Republic : avant les primaires démocrates de 2004, le magazine politique américain avait demandé à ses contributeurs d'argumenter en faveur du candidat de leur choix. Un seul manquait à l'appel, parce que personne ne voulait prendre sa défense : John Kerry. Cette fois-ci, Ratzinger se trouvait bien, in extremis, dans la liste des "the case for...".

Et autant, enfin, pour la malédiction qui pesait sur les Bavarois : Franz-Joseph Strauss et Edmund Stoiber sont, indirectement, vengés.

Que dire de plus? D'abord que Ratzinger n'est pas un gros con d'ultraconservateur. Il est ultra, d'accord, à la fois sur les questions de morale (j'en avais déjà parlé à l'automne dernier), sur les rapports entre la sphère religieuse et la sphère politique ou sur la distribution du pouvoir au sein de l'Eglise. Mais il a aussi une puissance de feu intellectuelle peu commune, un peu à la manière d'un Antonin Scalia. Ce qui, au choix, le rend d'autant plus dangereux ou beaucoup moins suceptible de se forger une aura populaire à la Jean-Paul II (qui n'était certes, lui non plus, pas vraiment un crétin). Et ce nonobstant la présence ancienne d'un fan club du Panzerkardinal.

Un détail étonnant, aussi, est le choix du nom de Benoît (Benedictus en latin, Benedikt en allemand, Benedict en anglais). Phersu remarque qu'on ne s'attendait pas à ce que Ratzinger se transforme en Jean XXIV. Mais Benoît XV était un pape plutôt progressiste. Si Ratzinger avait voulu rendre hommage au dogmatisme triomphant, il se serait placé dans la lignée des Pie. Soit c'est une simple manoeuvre destinée à rassurer les sceptiques, soit cela annonce un pontificat plus modéré que celui auquel tout le monde s'attend. Nous verrons bien.

On peut déjà conclure, par contre, que Ratzinger a des goûts musicaux de merde. Choisir le même nom de famille que Damien Saez, fallait oser quand même.

Add. (midnight) : Une explication alternative au choix de Benoît XVI est la volonté de Ratzinger de coller à la prophétie de Saint Malachie. C'est tiré par les cheveux, mais pas totalement impossible.