30 décembre 2005

Baisse du chômage : encore un trompe-l'oeil? 

C'est malin. A force de stigmatiser les chômeurs, le gouvernement a réussi à faire que de moins en moins de monde veut être au chômage.




L'observateur attentif (et qui sait que DEFM signifie, dans le jargon daressien, "demandeurs d'emploi en fin de mois") notera le moment exact du retournement de la courbe et en tirera la seule conclusion qui vaille : comme l'avaient prédit les noniens au moment de la campagne, le rejet de la constitution européenne a bien permis de repousser de façon décisive les forces mondialo-ultralibérales qui menaçaient la survie de l'emploi en France. Avec des effets spectaculaires sur la courbe de chômage.

Etrangement, les forces de progrès rechignent à célébrer leur victoire. Sans doute par excès de modestie.

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Sur un plan moins bêtement sarcastique, cette huitième baisse du chômage en huit mois est évidemment encourageante. Parce que les critiques sur le fait que la baisse est purement "statistique" ne tiennent pas vraiment, surtout si elles se focalisent sur des radiations administratives qui ne montrent aucun signe d'augmentation notable sur la période récente (voir la synthèse de la DARES pour novembre 2005 -pdf- et le bulletin mensuel des statistiques du travail pour octobre 2005 -pdf- qui donne les séries depuis le début 2003).

Les absences au contrôle augmentent elles de façon très sensible depuis juin 2005 (et de 40 000 par rapport à novembre 2004, soit l'intégralité de la hausse des "autres motifs de sortie"), mais il est difficile d'en tirer une conclusion univoque : cela peut aussi bien signifier une hausse des chômeurs découragés -ou qu'on a découragé- qu'une augmentation des reprises d'emploi non-déclarées.

A contrario, il est clair qu'on ne sait toujours pas si la baisse récente du taux de chômage est due uniquement à la conjonction de facteurs démographiques (augmentation des flux de départ en retraite) et administratifs (la montée en charge du plan Borloo), ou bien si elle traduit une véritable augmentation des effectifs du secteur privé. On se rappellera à ce propos que les chiffres de l'emploi marchand pour le troisième trimestre avait été extrêmement décevants.

Les indicateurs macroéconomiques sont certes plutôt favorables ces derniers mois, et la hausse importante des offres d'emplois déposées à l'ANPE semble indiquer un vrai rebond sur la fin d'année 2005.



Mais il faudra attendre le... 17 février 2006 et la publication des chiffres de l'emploi marchand pour le 4e trimestre 2005 pour en être sûr.

Add. (19H00) : très bonne dépêche de Reuters, qui ne se contente pas du "he said, she said" mais prend la peine d'aller fouiller les séries statistiques de la DARES pour évaluer le bien-fondé des critiques des syndicats. C'est suffisamment rare pour être souligné.