17 février 2006

Emploi salarié : toujours le calme plat 

Quoiqu'en dise le gouvernement, les chiffres provisoires de l'emploi salarié publiés ce matin par l'INSEE (16 200 créations nettes sur un trimestre, 64 800 sur un an) sont très décevants. Le chiffre sur un an est certes meilleur qu'en 2004 (difficile de faire pire), mais la reprise sur le marché du travail que laissait supposer la baisse continue du chômage depuis le printemps 2005 n'est clairement pas au rendez-vous. Et les chiffres sont franchement pitoyables comparés au rythme de création d'emplois qui était la norme entre 1997 et 2001.



Il est d'ailleurs symptomatique, comme le note justement Eric Heyer, de constater que le nombre de chômeurs a baissé beaucoup plus que le nombre d'emplois créés n'a augmenté en 2005, alors que c'est normalement l'inverse. De quoi conforter la thèse de ceux qui ne voyaient dans la baisse récente du chômage qu'un effet de facteurs démographiques et de montée en charge des emplois aidés façon plan Borloo. Et jeter un gros doute sur l'explication de la baisse du taux de chômage par la mise en place du CNE.

Add. (20/02) : Laurent Guerby, qui illustre la règle selon laquelle tout commentateur de qualité finit un jour par ouvrir son propre blog, a une note plus générale sur la question de la fiabilité des chiffres du chômage et de l'intérêt des comparaisons internationales en la matière. Il parvient à peu près aux mêmes conclusions qu'Etienne Wasmer dans un article récent pour Telos :
Le divorce entre le pays et ses producteurs de statistiques ne profitant qu’aux extrêmes, il est urgent de supprimer le battage médiatique autour des chiffres du chômage et au contraire se concentrer sur un indicateur nettement moins contestable, le nombre total d’heures travaillées, en volume et en taux d’emploi, rapportées à la population en âge de travailler, voire à la population totale si on veut mesurer par-là la capacité de l’économie à financer sécurité sociale et retraites.
Ce type de proposition est séduisante, mais on peut formuler trois objections rapides. D'abord, le chômage a une importance en soi, quel que soit le niveau du taux d'emploi. Ensuite, le taux d'emploi dépend aussi de facteurs culturels (l'âge de la retraite, la durée des études, la présence des femmes sur le marché du travail), ce qui réduit sa pertinence pour les comparaisons internationales, du moins si le but est d'évaluer les performances respectives des marchés du travail. Enfin, le chiffre du chômage est beaucoup plus facile à obtenir (parce que les données sont de toutes façon collectées dans le cadre du système d'assurance chômage) et à calculer régulièrement que celui du taux d'emploi, qui suppose de mettre en place des enquêtes coûteuses sur un échantillon d'entreprises.