04 février 2006

Mais pourquoi est-il aussi impopulaire? 

La hardiesse que met Dominique de Villepin pour enterrer le dialogue social et tout espoir d'évaluation des politiques de l'emploi en France a convaincu bon nombre de commentateurs politiques qu'il était désormais un prétendant plus que sérieux pour l'Elysée. Pendant ce temps, sans qu'on y prête une attention démesurée, notre pauvre Premier ministre s'est encore pris un méchant gadin dans le sondage TNS-Sofres du mois :
Dominique de Villepin voit sa cote de confiance reculer de cinq points, à 38%. Cinquante-six pour cent des personnes interrogées ne font pas confiance au Premier ministre pour résoudre les problèmes de la France.
Du coup, Villepin repasse devant Bérégovoy au grand classement intertemporel des chefs de gouvernements les plus impopulaires après 8 mois de mandat.





Certes, son impopularité actuelle n'est pas (encore?) au niveau des deux spécialistes toutes catégories de l'exercice. Mais l'écart avec les autres Premiers ministres qui l'ont précédé depuis 1981 commence à devenir béant. Et le grand Dom' s'approche très dangereusement de la zone d'impopularité dont aucun chef de gouvernement n'a réussi à s'extirper depuis 25 ans, comme le montre le peu lisible mais très coloré graphique ci-dessous (comme toujours construit avec les précieuses données mensuelles de TNS Sofres).

Voir le graphique et la suite



Le moins que l'on puisse dire est que la courbe de popularité de Villepin s'apparente plus, pour l'instant, à celle d'un Juppé ou d'un Bérégovoy qu'à celles des trois Premiers ministres préférés des Français depuis 1981. Cela dit, ni Rocard, ni Balladur, ni Jospin n'ont réussi à se faire élire Président. Ce qui est déjà une bonne raison de relativiser ce type de comparaison.

L'autre raison est beaucoup plus fondamentale : le dernier sondage de TNS Sofres s'éloigne considérablement des résultats des 5 autres instituts français qui réalisent des "baromètres" mensuels sur la confiance à l'égard de l'exécutif. On le voit très distinctement sur le magnifique graphique ci-dessous, qui s'inspire fortement de ce que fait Pollkatz pour les sondages américains. Contrairement à ma pitoyable tentative précédente, les résultats sont ici représentés au jour près, plus précisément au dernier jour d'interview des sondés.




Clairement, le dernier sondage TNS Sofres fait figure d'anomalie dans une tendance d'amélioration progressive, depuis octobre dernier, de la cote du Premier ministre. En janvier, Villepin était au plus haut depuis son entrée en fonction selon 4 instituts sur 6 (Ipsos, Ifop, CSA et LH2). TNS le voit, en fin du mois, au plus bas. Il y a de quoi s'interroger sur la fiabilité de ce dernier résultat.

Il n'est certes pas impossible que la polémique sur le CPE ait fortement pesé sur la cote du Premier ministre entre le 21 janvier (date du dernier sondage BVA) et le 28 janvier (date du sondage TNS Sofres). Encore une fois, il faudra attendre les prochains sondages des 5 autres instituts pour février pour confirmer que le résultat de TNS est bien un "outlier", comme on ne dit pas en fançais. Sauf qu'entre temps, évidemment, d'autres événements auront eu lieu, qui rendront la comparaison faussée.

Une seule conclusion semble donc valable pour le moment : les discours sur le fait que Villepin aurait gagné la bataille de l'opinion sont à prendre avec des (grosses) pincettes. Les remarques, y compris les miennes, sur son exceptionnelle impopularité aussi.