11 avril 2005

Deck Chairs on the Titanic 

Périodiquement, les hypermarchés changent la disposition des rayons pour empêcher les clients de s'habituer à un parcours qui leur permettrait de n'acheter que ce qu'ils sont venus chercher dans le magasin.

Périodiquement, le New York Times change les jours de passage de ses columnists pour forcer les lecteurs qui n'achètent le journal que pour les tribunes de Maureen Dowd ou de Tom Friedman à modifier leurs profils de consommation (histoire que chacun passe de temps en temps à la caisse pour le NYT du dimanche avec ses 32 suppléments en couleur, ses 3,5kg de papier et ses 4$ -me semble-t-il- de valeur faciale).

Vous allez me dire : on s'en fout, de toute façon on lit le New York Times sur Internet, parce qu'il n'est pas possible de l'acheter en France. Ce qui est assez largement vrai, même si on peut trouver, en cherchant bien, le NYT du dimanche à Paris. Chez Brentano's par exemple, pour la modique somme d'à peine 10€. Et puis, il n'est pas impossible que les lecteurs internautes se sentent eux aussi perdus face au bouleversement de leurs habitudes de lecture. Heureusement, Ceteris Paribus vous offre en totale non-exclusivité ce tableau bien pratique, volé sur les pages Internet du NYT :

Que constate-t-on? D'abord que les responsables des op-ed ont mis fin à la cohabitation délétère entre Krugman et Brooks, qui avaient une fâcheuse tendance à se lancer des méchantes piques par chroniques interposées. Ensuite que Frank Rich, qui était retourné écrire des chroniques culturello-politiques après un passage par les op-ed, revient pour faire des chroniques politico-culturelles le dimanche. Mais c'était déjà le cas depuis quelques mois.

On remarque aussi, pour ceux du fond qui ne suivent pas tout, la retraite de Bill Safire, le chroniqueur américain qui appelle à la rescousse le fantôme de Nixon ou passe un coup de fil à Sharon quand il est en panne d'inspiration. Et qui ressemble à Alain-Gérard Slama, au niveau de la mauvaise foi caractérisée.

Sinon, tout ceux que je voulais virer (et j'avais largement raison, même si Krugman nous gratifie aujourd'hui, exprès pour me faire mentir, d'une chronique tout à fait correcte) restent. Et celui que je voulais garder (et j'avais tort) reste aussi.

C'est tout? Non. Parce que les esprits vifs auront noté la présence d'un petit nouveau, John Tierney, qui inaugure sa chronique demain. Il remplace Safire, il est donc de droite, tendance libertarien provoc'. C'est qu'il faut garder des token conservatives au Times pour tenter d'amadouer les pourfendeurs de MSM.

Tierney, qui a longemps sévi dans les pages du New York Times Magazine, s'était d'ailleurs fait pas mal allumé dans un long article de The American Prospect en 2001. Article qui donne un bon aperçu des agaçants travers du personnage. Et qui rappelle un détail qui prend une importance savoureuse : John Tierney avait accroché Maureen Dowd à son tableau de chasse. Ou le contraire, vu qu'une femme qui fait un métier d'homme est forcément castratrice. En tout cas, je sens que l'ambiance va être sympathique dans les pages op-ed du samedi.